À peine remis de son périple sur l’exigeant Desertus Bikus, Nicolas Fritsch a remis sa machine en route pour partir en (re)connaissance aux confins de la Bretagne, lieu de départ de la Born To Ride à laquelle il participera en juin 2023. Une occasion rare de goûter aux reliefs inattendus de la Breizh et aux bières fraîches de chez ses amis du BZZZT Café, dans le lointain Finistère.

Quistinic – Plouguerneau

Après une bonne journée de repos, je repars vers le nord. Je ne soupçonnais pas la richesse foisonnante des forêts du Morbihan et du Finistère Sud. Ces deux territoires me rendent coup sur coup des raidillons qui font sérieusement concurrence à ceux du Pays Basque. Je ne compte plus les changements de rythmes cardiaques sur 80 km à travers ces Montagnes Noires.

  • © Nicolas Fritsch

En bricolant ma trace sur Komoot, j’ai dû choisir les passages les plus grimpants sans le savoir, donc je n’ai pas été étonné de voir « Montagne de Laz, alt. 264m ». Pas surpris non plus de voir autant de calvaires à la croisée des routes. Je priais en sourdine que le relief cesse de me faire souffrir.

Je teste les contreforts des Monts d’Arrée et mes jambes le sentent bien. Une descente folle, les mains sur les freins me projette dans les tréfonds ensoleillés et coupés du vent de la commune de Pont-de-Buis-lès-Quimerch. Pour m’en extirper, c’est une longue pénitence oscillant entre 8 et 15%. Les nuages d’orages menaçants remontent par le sud comme s’ils empruntaient mon parcours.

  • © Nicolas Fritsch

Je prends un peu d’avance et m’engouffre fièrement dans le Parc Naturel d’Armorique. Je franchis la rivière du Faou (se prononce -fou) et attaque pour la centième fois, au moins, une montée à démoraliser un peloton basque espagnol. Rattrapé par mes poursuivants suspendus, j’évite de justesse en me réfugiant sous un abribus la plus grosse averse de la journée. Vingt minutes à contempler des billes d’eau s’écraser sur le bitume fumant de l’Hôpital-Camfrout. Nouvel épisode pluvieux, nouvel abribus minuscule en bois, presque une niche pour gros chien mais je suis au sec.

Et comme les averses vont par trois (cqfd), je n’aurais pas autant de chances pour la dernière. Engoncé dans l’imperméable moite, je m’enfonce dans un buisson sous un arbre pour vérifier que rien ne vaut un toit digne de ce nom. Trempé, lavé, rincé. Je ressors de mes broussailles et comme un cheval s’ébroue, je secoue mon squelette refroidi. Une longue descente et quelques rayons de soleil me sèchent jusqu’au large pont Albert Louppe, désormais dédié aux piétons et vélos. La vue sur la rade de Brest est magnifique, une lumière vaporeuse flotte au-dessus des eaux mélangées de la mer d’Iroise et du fleuve côtier l’Élorn.

  • © Nicolas Fritsch

J’évite par l’Est cette ville aux incessantes influences maritimes et m’agrippe tant bien que mal à une départementale bien chargée d’automobilistes quittant leur lieu de travail. Je bascule sur un versant Nord et sent une légère brise remontant de la côte. J’aperçois à l’horizon l’impressionnant phare de l’Ile Vierge et je reconnais les derniers chemins étroits d’une balade botanique qui descendent vers une plage hors des sentiers.

Le soleil se couchera en face de la maison de mes amis retrouvés qui ont ouvert dans ce discret port de Perros, le Bzzzt Café. Quel nom « Bizzzarre » ! Bercé par les eaux calmes de l’Aber Wrac’h, le gosier rafraîchi d’une mousse, je tressaille à l’idée du retour par d’autres chemins. Il y a toujours un retour à l’endroit d’un nouveau départ.

  • © Nicolas Fritsch