Le Grand Tour Paris s’est révélé une aventure inédite. Tout d’abord parce que cette épreuve organisée les 17, 18 et 19 mai 2019 était une première. Parce qu’ensuite notre trio de Gravillon(s), qui n’avait jamais eu l’occasion de convoler sportivement dans la capitale, sur les ovales de Vincennes ou de Longchamps, ou sur le Classics Challenge dont la rumeur cycliste enfle chaque mois un peu plus, s’est présenté au départ. Parce qu’enfin ce roulage en grand comité promettait une expérience nouvelle à des compères habitués à partager le bitume en toute intimité.
Malgré l’affluence, un air de (réunion de) famille a embaumé l’événement. Des sourires et des encouragements comme s’il en pleuvait des visages et des mains d’organisateurs rompus à la Chose cycliste. Une ambiance qui donne envie de prendre le départ et — surtout — de rallier l’arrivée, pour partager une bière et un plat chaud, tombés du food truck, quand le soleil rechigne à s’imposer en cette fin de mois de mai.
Tel l’animal blessé — de certains diront « l’ours mal léché » — nous apprécions habituellement de rouler à couvert, dissimulés derrière les herbes hautes qui foisonnent dans les fossés. Le verbe rare, mais l’œil rieur. C’est donc avec l’oreille dressé, aux aguets, dans le vacarme des cales qui s’enclenchent, des chaînes qui tressaillent et du brouhaha des hauts-brailleurs du peloton que nous nous sommes élancés des abords du château de Fontainebleau. Parmi une armée en (dé)route aux uniformes dépareillés et aux montures nerveuses ne se soumettant guère à la marche en colonne. Un régiment au sein duquel, la sueur venant à poindre sur tous les fronts, on vient pourtant rapidement à nouer des alliances et à commenter le spectacle de ces verts panoramas entourant Paris.
Trois jours et quelque 540 km d’effort cycliste qui ne ressemblent en rien aux aventures dont Gravillon se délecte habituellement. La contemplation n’est pas d’usage et les curiosités qui pourraient mériter une attention particulière et une typique photographie — ici une demeure majestueuse nichée dans un bois ou là une borne kilométrique hors d’âge indiquant notre distance respectable de Paris — sont, à regret, souvent dédaignées. Nous observons ces mains qui fouillent régulièrement l’arrière des maillots pour dénicher une barre de céréales alors que nos doigts seraient plutôt tentés de parcourir le menu de ce restaurant de village, sur laquelle l’œuf mimosas règne encore en maître.
La carte mérite pourtant le détour. Et la gourmandise cycliste est régulièrement assouvie. Quelques dénivelés ont laissé un souvenir francilien à nos mollets et de superbes bâtisses sont venues graver des images patrimoniales dans nos esprits. À l’instant, rare, où nos compagnons d’épopée, locaux de l’étape rompus aux reliefs et façades du terroir, nous laissent le loisir de jouir de l’effort et du spectacle.
Le naturel est donc revenu au galop. Une expression qui s’impose quand, à chaque coin de prairie, à Chantilly ou à Fontainebleau, un centre hippique vient nous rappeler que la (l’Île de) France est terre d’équitation. Et du troupeau, nous n’avons pas tardé à nous extirper pour finalement préférer battre le pavé, braver le vent et, parfois, la pluie, en mode restreint. À trois, à distance respectable des écarts, des freinages et des incartades pour apprécier cette Chevreuse vallonnée dont on nous vantait les mérites sinueux.
Les images officielles de ce Grand Tour Paris 2019 (© Track&Film)