Avoir la chance d’accéder au meilleur de la presse cycliste et partager un extrait qui a retenu l’attention : telle est l’intention de cette rubrique de Gravillon baptisée « Morceau choisi ».

Nouvel invité de cette série d’articles qui rend hommage à l’écrit, à l’encre et au papier : le magazine 200 dans sa déclinaison été 2020.

Alain Puiseux s’est immiscé dans un archipel inédit : le Massif Central. La mer s’est retirée depuis longtemps mais un chapelet d’îles, dont les pics culminent à 1000 mètres, continuent d’intriguer les aventuriers. Cette Auvergne invite à la navigation, au cabotage le long des volcans. Elle déferle sous les roues. Elle atteint des sommets de délectation et de découverte cyclistes.

« Les Iroquois
Après ce virage-là, qui est encore à l’ombre des arbres, il en reste deux ou trois autres, qui ne sont même pas des lacets. Et puis on débouche sur le plateau. Les nuages y sont un peu plus grands qu’ailleurs. La lumière y est rapide et changeante au-dessus d’une houle d’herbe. Le vent vous tient entre ses doigts. Il vous lâche et vous rattrape quand ça lui chante. L’espace soûle. Les forêts sont des crêtes d’Iroquois, des traits d’arbres bien serrés en haut des monts.
Vous êtes à 1000 mètres d’altitude, et vous n’avez plus envie de descendre. Vous êtes au bord, sur l’un des bords d’une merveille de 200 kilomètres de long, à vol d’oiseau, du sommet du Puy-de-Dôme au mont Aigoual. En largeur, presque autant, de Laguiole aux monts d’Ardèche.
Vous pourrez passer des semaines à rouler là-haut, à mille mètres ou plus, sans jamais redescendre, sauf quelques vallées, en apnée. Sept ou huit pays s’y serrent les coudes, qui n’ont jamais vu un douanier.
Il m’a fallu un an et quatre expéditions pour en faire le tour, ou croire que je l’avais fait. Autant chatouiller une montagne avec la pointe d’un Opinel : il m’en reste mille fois autant à découvrir. Mias ces pays-là vous donnent envie de les aimer. Et puis j’avais dans mes sacoches, pour me guider, une carte merveilleuse relevée et dessinée par un étrange explorateur. »

La suite de ce texte « Là-haut », écrit par Alain Puiseux, dans le numéro 25 de 200.