Avoir la chance d’accéder au meilleur de la presse cycliste et partager un extrait qui a retenu l’attention : telle est l’intention de cette rubrique de Gravillon baptisée « Morceau choisi ».

Nouvel invité de cette série d’articles qui rend hommage à l’écrit, à l’encre et au papier : le magazine 200 dans sa déclinaison printemps 2019.

Alain Puiseux n’était à priori pas véritablement tenté par le Biking Man Oman, course d’ultracyclisme organisée dans ce pays de la péninsule d’Arabie. Mais l’envie de découvrir de nouveaux panoramas, de faire des rencontres, de traverser le désert et de vivre une aventure inédite a été plus forte.

 » Un voyage au long cours est fait de respirations. Serrées, courtes, quand la chaleur, le stress, la fatigue vous prennent. Le goudron comme la sole d’un four, la chaleur qui tourbillonne ; quand elle vous relâche, on respire de nouveau, largement, lentement.
On s’émerveille de la lumière ou d’un village que l’on traverse au soir, et des arbres et des filets d’eau des jardins qui font baisser la température. On regarde cette montagne couleur de rose des sables, immense, tremblante d’une brume jaune, sur la gauche. Et l’on se remet dans les prolongateurs. L’autoroute ne traverse pas les villages, tant mieux pour eux. Les hommes y sont en habits blancs — Oman est la capitale mondiale de la blanchisserie. Oman est aussi, même si cela frappe moins que la chaleur, un pays de douceur et d’attentions, dont une distance et un calme très élégants.
Aux carrefours, souvent, des abris, invariablement carrés et à claire-voie, munis d’un rebord en béton faisant office de banc. Cinq mètres sur cinq environ. Les plus jolis sont carrelés d’azulejos, les plus simples en ciment. Le vent y joue et s’il n’y a pas de vent, l’air au moins semble s’y rafraîchir. Ces abris sont des merveilles d’architecture. J’y ai fait plusieurs siestes, pour me reposer des 35 et parfois 40 degrés des milieux de journée. Encore un peu de réchauffement climatique, et ils pousseront au bord de nos routes. À deux reprises, pendant que je pédalais, j’ai senti tout près de moi, beaucoup trop près, le souffle d’un moteur ; mais ce n’était qu’un 4×4 ralentissant à ma hauteur pour que le passager puisse me tendre, par la vitre baissée, une bouteille d’eau. J’ai pris la bouteille, salué et remercié sans cesser de pédaler.
La voiture est repartie. »

La suite de ce texte « 47°2 le matin [dans la chaleur d’Oman] », écrit par Alain Puiseux, dans le numéro 20 de 200.