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Les récits de The Radavist #26 : L’histoire véritable en photo
[Par Brian Biggs & Abe Landes]

Les photos prises sur un événement racontent-elles la véritable histoire ? Rappellent-elles seulement une journée sympa à vélo que nous pouvons montrer sur les réseaux sociaux ? Ou peuvent-elles raconter une histoire différente à laquelle nous n’avons pas prêté attention ? À l’occasion de l’événement gravel Lu Lacka Wyco Hundo, le photographe Abe Landes s’interroge sur le rôle que jouent les photos dans le récit  du déroulement véritable de la course. Et le cycliste Brian Biggs partage son avis sur le sujet…

C’est une photo en noir et blanc, prise au grand angle, d’une pièce presque vide, une sorte de salle de réception. Certaines tables sont dépliées, d’autres sont rangées contre le mur. Des boîtes de serviettes absorbantes et des bouteilles d’eau sont posées sur un chariot de service. Il y a quelques personnes sur la photo, certaines en tenue de vélo, d’autres non. À part le vélo et le cycliste allongés sur le sol en lino, il n’y a pas grand-chose à voir. Il ne se passe pas grand-chose.

Regardez de plus près. Ce vélo. Ce cycliste. Ce type qui rit en regardant l’appareil photo. Une histoire se dévoile pourtant. Quelque chose s’est produit, et quelqu’un était là pour le prendre en photo.

Ce quelqu’un, c’est Abe Landes.
Le cycliste sur le sol, c’est moi.
Ce quelque chose qui s’est produit, c’est Lu Lacka Wyco Hundo, en 2019.
Et oui, il y a une histoire à découvrir.

Il y a une autre photo du même coureur, lors de la même sortie, prise onze heures plus tôt, par le même photographe. Celle-ci est en couleur, le coureur est toujours sur le vélo, et on sent une certaine anxiété, une petite appréhension de ce qui l’attend. Cette photo ressemble davantage à la photo standard d’un événement cycliste que nous connaissons tous. Nous nous inscrivons à l’événement, nous participons à l’événement. Ensuite, nous recherchons parmi des centaines de photos en ligne les photos de nous en train de participer à l’événement, pour les télécharger et les publier, pour les montrer et nous rappeler ce que nous avons fait, ce plaisir que nous avons ressenti, cette journée cool sur le vélo. Nous voulons une preuve que c’est arrivé et nous voulons que cela raconte une histoire.

Quelle est cette histoire ?
Lu Lacka Wyco Hundo est un événement vélo qui sillonne les collines, les vallées et les bois situés au nord de Pittston, en Pennsylvanie. Le nom vient des trois comtés traversés par la balade : Luzerne, Lackawanna et Wyoming. Hundo, bien sûr, signifie cent, comme en miles. L’itinéraire suit plus ou moins la rivière Susquehanna, jusqu’à la ville de Tunkhannock et retour à Pittston. La rivière est à proximité à chaque instant, et si elle n’est pas visible en permanence, elle offre toujours la possibilité d’un sauvetage. Après chaque virage à droite qui monte tout droit sur la colline, il y a probablement un virage à gauche qui descend vers la rivière, facilitant le retour vers Pittston.

Lu Lacka, comme on l’appelle habituellement, existe depuis 2013. L’événement est organisé par Pat Engleman, et les routes et les chemins qu’il suit sont les mêmes que ceux empruntés par Pat Engleman lorsqu’il était enfant. En fait, il commence à la caserne des pompiers où son oncle travaillait, il emprunte une piste sur laquelle il a appris à faire du VTT, et il emmène même les coureurs devant la maison dans laquelle il a grandi, et où sa mère vit toujours. C’est l’un des événements gravel les plus anciens. Il y a des événements plus récents, plus connus, avec des parcours plus difficiles et des mises en scène plus grandioses. Si les événements cyclistes étaient des coureurs, Lu Lacka ne serait pas le gamin cool qui se présente dans un équipement flashy et un vélo de luxe, qui parle fort et qui se la pète. Lu Lacka est le vétéran grisonnant portant un T-shirt noir délavé avec un vélo en acier, qui fume une cigarette et vous regarde fixement.

La suite du récit en anglais :