Des rêves de grandeur. Des frissons au creux de la selle. Comme une envie de prendre de la hauteur. Telles sont les sensations qui sont venues poindre à l’entame de cette année 2023 marquant les 10 ans du site gravillon.net.

Pour lancer les festivités sur un terrain de connaissance, partager le beau et le grandiose avec les amis qui sont venus étoffer notre peloton au fil des années, le premier rendez-vous de ce printemps 2023 tardant à venir était les Pyrénées. Des terres et des pentes explorées plusieurs fois au cours de la vie cycliste et digitale du groupe, tant dans les premiers élans montagneux de 2015 qu’au cours d’une grande traversée, en 2017, qui reste encore dans les mémoires.

« Le Pla en hors d’œuvre » : ce jeu [approximatif] de mot a immédiatement accompagné notre ascension apéritive, lancée sans autre échauffement à notre arrivée au pied des pentes. Pour rompre avec les habitudes instaurées sur l’autre versant, à Argelès-Gazost, notre camp de base est installé cette année à Saint-Lary-Soulan et nous ouvre de nouvelles perspectives sur la montagne. Le Pla d’Adet traîne depuis de nombreuses dans notre imaginaire cycliste, sans doute imprégné de quelques souvenirs télévisuels et victoires françaises.

Malgré les grandes et impressionnantes ascensions qui l’entourent, le Pla d’Adet, plaqué modestement sur le flanc de la montagne, sait immédiatement mettre les jambes en température. Les panneaux qui accompagnent le parcours, kilomètre après kilomètre, affichent à plusieurs reprises une moyenne de 11% de dénivelé.

L’échauffement se transforme en véritable exercice, permettant de répéter transitions et relances pour les jours à venir. Et quand vient le sommet, alors que la température est indigne de la saison, la station qui apparaît n’est que silence et désolation, volets clos et vaches errantes. Le sauvage a des vertus mais il aurait mérité d’échapper au béton qui l’a recouvert dans ces années passées d’adoration des sports d’hiver.

De notre traversée des Pyrénées, en juillet 2017, nous restait le souvenir ému du passage du col de la Hourquette d’Ancizan, voie offrant une alternative rafraîchissante au célèbre Aspin.

C’est donc sur cette pente que le groupe est venu se grouper pour attaquer une journée annoncée comme âpre. Une montée tout en dénivelé, adrénaline et bonne humeur. De cette humeur dont Gravillon a le secret, oscillant entre le potache et l’éclairé. De cet humour dont Gravillon s’est fait le chantre. Entre graveleux et inspiré.

« Jusqu’ici tout va bien » pensent déjà certains, qui se souviennent de cette tirade ouvrant le film La Haine. Ces certains qui savent également que « l’important c’est l’atterrissage », cet atterrissage prévu quelques heures plus tard au sommet du Tourmalet, après avoir attaqué la montée par Saint-Marie-de-Campan et nous être prosternés au pied d’un Eugène Christophe brandissant toujours vaillamment sa fourche.

Flamboyants nous fûmes. Accablés nous sommes. Quelques kilos de plus. Quelques années de plus. Quelques kilomètres de trop. Quelques regrets nouveaux. Alors que nous tablions sur une ascension tout en gestion, le Plan d’Adet de la veille nous faisant faire gorges chaudes, le Tourmalet ne verra pas tous ces géants arriver au sommet cette année.

Le col, encore fermé il y a quelques heures, est pourtant plaisant à gravir, camping-cars et promeneurs motorisés nous épargnant de leurs effluves et trajectoires approximatives. Les socquettes légères ayant rapidement échappé à notre vue dans les méandres, nous sommes un trio qui reste collé au bitume.

Quelle est donc cette mélasse qui s’agrippe à nos roues et ralentit notre progression ? Sont-ce les quelques confits de canards et patates généreuses de l’hiver qui tendent nos lycras qui nous empêchent désormais de faire défiler les hectomètres dans la pente ? D’interminables hectomètres entrecoupés de ravitaillements amers et de pauses essoufflées.

Quelques échanges empreints de fatalité et, toujours [toujours !], un sourire complice qui vient ponctuer l’instant, un instant qui vient sceller un nouveau pan de l’histoire de Gravillon. Il faut se rendre à l’évidence. La Mongie, station figée en altitude, signe notre volte-face. Une répit de courte durée, et une descente vite dévalée, avant d’attaquer le versant contraire de l’Hourquette, tant encensée à l’aller que maudite au retour. Le vélo pèse dans les jambes. Le doute s’immisce dans les têtes. L’arrivée tarde à se profiler. Belle sans doute, mais haute est surtout cette montage.

Gravillon à 10 ans. Et de plus en plus de dents. #gravillon10th