Avoir la chance d’accéder au meilleur de la presse cycliste et partager un extrait qui a retenu l’attention : telle est l’intention de cette rubrique de Gravillon baptisée « Morceau choisi ».

Nouvel invité de cette série d’articles qui rend hommage à l’écrit, à l’encre et au papier : le magazine 200 dans sa déclinaison automne 2021.

Deux monuments au sommaire de ce nouveau numéro du magazine qui nous fait rouler autrement. Le premier est un cinéaste, Luc Moullet, qui a mis en scène un col empierré des Alpes dans un film loufoque aux accents cyclistes sorti en 1992. Le second est un (ce) col, le Parpaillon, qui attire chaque année grimpeurs, mules et autres usagers avides de caillasse et de franchissement de tunnels.

« Un maverick
Maintenu dans l’ombre et le passé par son petit-cousin le col de Vars (2 108 mètres seulement), un peu plus au nord et reliant lui aussi, via un bitume providentiel, la vallée d’Embrun et celle de l’Ubaye, le Parpaillon doit une bonne partie de son culte à un film homonyme et méconnu datant de 1992. Une farce pataphysique signées Luc Moullet, cinéaste confidentiel et cycliste émérite, contemporain de la Nouvelle Vague sans jamais y avoir appartenu. « Grâce à François Truffaut, j’ai écrit sur le cinéma pendant 65 ans, et, lancé par Jean-Luc Godard, j’ai fait durant 54 ans des films qui font rire sur des sujets sérieux, marxisme et taylorisme, vagin et clitoris. On me situe entre Brecht et Courteline, entre Bunũel et Tati. Je suis un maverick issu des ploucs préalpins, un marathonien capable de monter à vélo à 5 390 mètres, mais qui ne sait pas skier, ni danser, ni nager, ni conduire. »
C’est ainsi que le fallacieux Luc Moullet, 84 printemps, se présente dans sa réjouissante autobiographie, Mémoires d’une savonnette indocile, publiée au début de l’été.
Auteur d’une dizaine de longs métrages et d’une trentaine de courts, tous bricolé avec les moyens du bord, Luc Moullet fascine autant qu’il déconcerte par la naïveté de son style, volontairement décousu, qui entremêle l’intime et le saugrenu sans trop se soucier du spectateur, qui gagnera à ne pas prendre la poudre d’escampette trop tôt pour avoir l’opportunité de goûter au vertige d’un burlesque hors du temps et des modes. Revoir pour s’en convaincre Anatomie d’un rapport (1976), où l’auteur se met lui-même en scène dans un vrai-faux film érotique à l’ironie cinglante sur un couple déboussolé par la révolution sexuelle.

229 cols plus tard
Pour préparer notre excursion au Parpaillon, on a ainsi trouvé naturel de demander à Luc Moullet en personne de dessiner l’itinéraire. Car l’ancien critique des Cahiers du cinéma connaît les Alpes-de-Haute-Provence comme sa poche pour y avoir tourné une bonne partie de ses films et en avoir arpenté sommets pelés et sentiers muletiers depuis sa prime jeunesse, à pied ou à vélo. […] »

La suite de ce texte « L’effet Parpaillon », écrit par Jérémie Couston, dans le numéro 30 de 200.