Avoir la chance d’accéder au meilleur de la presse cycliste et partager un extrait qui a retenu l’attention : telle est l’intention de cette rubrique de Gravillon baptisée « Morceau choisi ».

Nouvel invité de cette série d’articles qui rend hommage à l’écrit, à l’encre et au papier : le magazine Cycle ! dans sa déclinaison été 2022.

À quelques jours du départ du Tour de France 2022, Cycle ! a choisi de donner la parole à un journaliste sportif émérite, grand parmi les reporters, qui a illuminé les colonnes du quotidien Le Parisien avant de devenir une signature d’importance à L’Équipede rédiger en chef le fameux Vélo Magazine et de s’adonner aujourd’hui à l’écriture de livres dédiés au vélo. Dans cet article aux couleurs chaudes et anecdotes cajolantes, « Le maillot jaune et moi », Claude Droussent, pour le bien-nommer, nous livre des souvenirs empreints de sueur, de courage, de laine et de lycra.

« Gamin ébloui, adolescent fan absolu de Merckx, j’ai ensuite eu la chance de pouvoir devenir jeune journaliste passionné, envoyé sur son premier Tour de France (bien d’autres suivront) en 1984. Aux côtés de trois plumes déjà confirmées du quotidien Le Parisien, j’étais pour cette première missionné à recueillir chaque soir les sentiments de Vincent Barteau, maillot jaune à durée déterminée certes (chipé à… Adrie van der Poel), mais 12 jours de Normandie à l’Alpe d’Huez via la façade atlantique, les Pyrénées, l’Aubrac et les Cévennes, cela crée des liens. Le rendez-vous était rituel. J’attendais Barteau derrière le podium, qui savait qu’il m’y retrouverait, son maillot jaune pour le lendemain enfilé. Vincent prenait le temps, il était drôle, volubile, le vrai « bon client » me disaient mes confrères plus aguerris. On était tous deux un peu tristes à l’Alpe d’Huez lorsque Vincent rendit, comme un dû, le maillot jaune à Laurent Fignon, son chef de file.
Deux ans plus tard, on avait sans doute au Parisien considéré que j’avais pris un peu d’assurance. J’étais chargé de pister le moindre fait, geste et coup de gueule de Bernard Hinault, déjà quintuple vainqueur et cette fois englué dans sa promesse de vouloir favoriser la victoire finale dessin jeune partenaire américain, Greg LeMond. Je connaissais bien les deux gaillards. J’avais interviewé Greg pour la première fois en 1981, quelques minutes après sa première victoire chez les pros, à Creil, dernière étape du Tour de l’Oise. Bernard avait sans le vouloir accéléré ma carrière en m’ouvrant les portes d’un scoop en 1983, m’annonçant à moi seul sa blessure au genou et son forfait sur le Tour qui s’annonçait. Merci Hinault ! En 1986 donc, époque où il suffisait encore de frapper à la porte de la chambre des champions pour obtenir leurs confidences, j’entrais dans celle de Hinault, dans un hôtel de Toulouse. D’entrée, je remarquais le maillot jaune – enfilé quelques heures plus tôt sur un podium – roulé en boule sous le lit. Quotidien banal d’un immense champion. Hinault n’en avait plus que pour trois jours en jaune dans sa carrière, il s’en doutait. Le « sacré » en avait pris un coup ce soir-là. »

La suite de ce texte « Le maillot jaune et moi », écrit par Claude Droussent, dans le numéro 19 de Cycle !.